J'ai commencé à m’intéresser au clavier du piano familial à l'âge de 4 ans, en regardant ma mère jouer le répertoire classique. Je reproduisais assez bien alors avec deux doigts toute la série des tierces naturelles, "sur les blanches"! Puis rajouter une tierce et un autre doigt pour l'accord parfait! Et cette consonance m'allait bien, même si la diminution naturelle de la quinte sur le si bécarre m'inquiétait un peu...

 

                Puis j'ai pris mes premiers cours à 5 ans à Paris, jusqu'en 1968, à l'époque où nous avons quitté les Buttes Chaumont de mon enfance pour nous installer sur le très compassé et très comme il faut plateau Saint Antoine du Chesnay, mon père venant d'être nommé à Versailles.

 

                J'intégrai alors les effectifs du non moins bien pensant collège, puis lycée Saint jean de Béthune, à deux pas de notre maison, où je fus pris en charge par Pierre Bouttier, pianiste et maître de chapelle. Il m'a initié puis fait découvrir le système tonal dans son intégralité, en particulier en me donnant accès à la tribune d'orgue de notre chapelle, en plus de mon cursus de piano. Ceci est particulièrement important, car je crois que ma conversion quelques années plus tard au jazz et au système modal  est en grande partie due à la pratique de cet instrument dédié à la grande polyphonie et à l'improvisation!

Je poursuivis mes études d'orgue sous la direction de Pierre Béguigné et Georges Robert, sur le grand Clicquot de Notre Dame de Versailles jusqu'en 1984, parallèlement à mon cursus d'harmonie et de composition à la Sorbonne.

 

                Je suis venu tout naturellement au jazz par Debussy, d'abord, qui commençait a sérieusement et avec quel brio augmenter ou diminuer nos quintes justes, puis Messiaen, qui lui utilisait le mode à transposition limité dans une majeure partie de son oeuvre, et forcément avait accès à certaines couleurs d'accords.

De cette époque aussi mon intérêt pour la percussion, pas si éloignée de notre attaque de clavier?

​

                Pour entrer et gérer au mieux ce flot d'informations nouvelles, les 7 modes naturels transposés dans nos douze demi-tons, et pour pouvoir en toute "sécurité" laisser libre cours à mon imagination sur de longues improvisations, je travaillais dans tous les sens la "matière tonale". Et cette matière, c'est incontestablement Bach et son très cérébral "Clavier bien tempéré":  24 préludes et fugues dans toutes les tonalités, tension et détente,dièse et bémol, par livre!

 Le Real Book et ses standards en grilles chiffrées venait compléter ma théorie et me donnait plus grande liberté pour renverser mes accords, à la recherche d'autres couleurs, moi qui venait de la lecture imposée en deux et trois clefs, exécutant docile. Dès 1985, alors que j'enseignais déjà, j'eus autour de moi des musiciens qui allaient en ce sens, privilégiant l'improvisation et le partage "ex abrupto" dans plusieurs formations en quartet. Enrichissant et tellement convivial! Et de là forcément mes premières compositions. Et de nouvelles rencontres dans le milieu artistique, qui m'ont amené pour un temps à la production.

​

​

Thierry Lafosse

​

C.2016

​

​

​